Vous lisez
Le goût des fromages du Kivu
Les oiseaux qui volent en rond
Pour oublier ce qu'ils ont vu
L'étourdissement d'un bétail humain
L'abattoir forceur
De silences complices
Le viol des cerveaux éduqués
Avant l'élevage sauvage
D'amnésiques neurones guerriers
Le feu dans le sang
Des vieillards épargnés
Incapables de parler
Du sort qu'ils ont vu exploser
Des yeux de bébés congolais
Quand d'autres témoins préféraient
Au bout du compte s'ouvrir les veines
Les traumatismes imprimés
Pour quelques euros-dollars
Sur papiers glacés
Qui ne feront jamais la une
Au fond d'une mine
Anti-personnelle
Où des minerais gisent dans la merde
La terre et les larmes
Des femmes et hommes en fuite
La mort dans l'âme
Sous une lourde pluie
De paroles de politi-chiens
Et de prêcheurs de rien
Qui ne viennent en aide qu'à eux-mêmes
Après le festin des loups
Des filles et des garçons partis
Traverser les frontières
Qui séparent les organes vitaux
De la justice, du travail et de la paix
Qu'ils s'éduqueraient à porter en eux
Des millions de fois
Jusqu'à accoucher d'un futur
Survivant aux faims mortifères
Dévorant tout sur leurs passages
Si seulement ils arrivaient au bout
Si seulement nous allions au bout
De l'inconsciente folie que nous apprend
La belle indifférence
Des cadavres égrainés sur la route infâme
D'une réalité
Qui relie chaque tragédie lointaine
À celle qui épluche
Nos cœurs brûlés
Au plus près des blessures
De l'intime peau plissée
Que l'on sauve comme on peut
Au milieu des fausses unités
Et des fosses communes
Qu'il nous reste
Pour contribuer au redressement
D'un pays au genocide sans nom
Au saint conseil des nations qui le nient
Et ce
À quel prix ?
Je ne sais pas
Trop cher pour se payer d'un coup
La tête de tout néo-colonialisme
D'origine étrangère ou locale
Dans tous les cas d'action
Trop cher pour être réglé
En une seule génération
Ni deux
Ni trois
Ni quatre
D'ailleurs