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un autre jour se lève
sur ma peau damnée
d'avoir cru au rêve
vendu sur panneaux
géants postés
à chaque coin
de la capitale
ventant les mérites
de toutes ces crèmes
éclaircissantes
suivant des formules
hautement mercantiles
dangereusement propulsées
par un complexe d'infériorité
continuant à répandre
les attributs occidentaux
au sommet de l'exemplarité
sans parler des risques
pour la santé publique
j'y ai vraiment cru, moi, qu'en étant
moins noir je serais plus heureux
que je plairais davantage à toutes
les femmes du pays
portant de faux cheveux
j'y ai cru dur comme l'enfer
que tout ce qui me rapprochait du blanc
augmenterait mon amour-propre
mais hélas
trois fois hélas
au final
je n'ai retenu aucune avancée de l'estime pour moi
et n'ai fait que perdre le bien-être de cet argent
que tenaient parfois les tâches foncées
qui subsistent sur mes mains
en souvenir de ma couleur d'origine
ce beau noir uniforme qui fait grandir
la dernière de mes filles
en cet autre jour qui se lève
sur ma peau damnée
par un cancer
je prie d'avoir assez de temps
pour apprendre aux enfants
à s'aimer
tels qu'ils sont nés