Une envie de fermer les yeux pour ne plus jamais avoir peur, pour oublier
tous ces échecs et prendre enfin de la hauteur, pour ignorer toutes ces
illusions déçues qui nous crèvent et voir enfin un nouveau jour qui se lève.
Etre aimer à contresens par des bras qui ne conjuguent qu'au féminin et
voir ses yeux qui se voilent par la douceur du venin, par cette tendresse qui
vous plonge dans une soif d'abandon et qui pourtant agit en vous comme un poison.
Se donner corps et âme à ce regard qui fait naître les larmes et se soumettre à ce sourire
qui malgré tout vous désarme. Essayer avec force de la faire changer de rive et
voir tous ces efforts partir à la dérive. Peut on fermer les yeux sur la raison pour
laisser exister ses émotions. Qui a le droit de juger deux coeurs qui se veulent,
doit t on se résigner et rester tellement seul. Comprendre que l'amour puisse avoir
parfois le visage de la différence, de prendre à contre pied sa nature et ses préférences.
Tu ne sais plus ce que tu ressens au fond de toi et ce sentiment nouveau pour toi te plonge
dans l'émoi. Tu ne veux pas admettre que le verbe aimer puisse se décliner au masculin
et que parfois une belle rencontre vous fait prendre un autre chemin. Je ne veux plus
te voir par intermittence, profiter de son absence pour me saisir de ta présence…
Elle ne sait plus t'aimer et moi de ta peau tu ne cesses de m'affamer… Anne, prends cet
amour qui vient tendrement t'effleurer et ignore cette autre qui semble vouloir te leurrer.
Je veux dormir dans ton corps, sentir ta peau sous mes doigts encore et encore, prendre le
temps de te parcourir en braille pour soulager mon esprit qui déraille, cette raison qui me
dicte de fuir ce combat perdu d'avance, de me soumettre docilement à cette terrible échéance,
A ce deuil qui prend mon âme blessée en otage et qui veut mettre fin à cette erreur d'aiguillage.
Je me souviens de ce jour où je me suis mis en danger, où d'un seul regard tu as su à jamais endommager, éveiller en moi ce besoin de t'approcher et de te posséder et sentir au creux de mes reins cette envie de t'entendre crier, de mélanger nos lèvres avec cette douce frénésie qui donne au mot fusionnel toute sa folie... Je t'aime toi qui parcours depuis toujours les poèmes de Sappho et qui aujourd'hui te sens séduite par un désir bien plus haut...