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J'ai vu l'antique griot surplomber la terre fraîche,
Et de sa main ridée, implorer les ancêtres.
J'ai reconnu l'authentique plainte funeste,
Les gémissements, les cris et leur lacrymal cortège.
L'homme plie, mais ne se rompt pas,
Les décennies défilent, et l'accablent de leur poids.
Les pères succèdent à leurs fils dans cette litanie
Où il s'emploie, non sans peine, à les rappeler à la vie.
Il supplie la grand-mère et rend hommage à l'oncle,
Celui qui d'une main a tenu la famille ;
Il vénère les neveux bien trop tôt partis,
Et énumère les autres membres de cet immortel Cénacle.
Les femmes pleurent, et le griot aussi :
La pluie a balayé le vin de palme à terre,
Les vieux ont accepté le défunt parmi eux.
L'homme est remercié, et la famille ravie :
Aucun fils n'aurait eu la mémoire assez claire
Pour raconter cette histoire qui pourtant parle d'eux.
J'ai vu l'antique griot surplomber la terre fraîche,
En sachant qu'après lui, personne ne parlerait plus.