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je suis descendu
pour te saluer
jeune colon
tes musées africains
ne manquent pas d'air
mais sortons
respirons ensemble
l'oxygène qui nous manquait
sur les sentiers battus
ces chemins de fer
posés sur des mains
depuis longtemps abattues
je suis descendu
pour t'inviter
jeune colon
à marcher sur les traces
d'un Martin qui luttait
en marche vers Washington
je sais que ça t'étonne
que des femmes
et des hommes
et toutes leurs couleurs
se soient mis d'accord
sur un bout de chemin
le temps d'un instant
le temps d'un refrain
brièvement partagé
free at last
free at last
free at last
thank God almighty
we are free at last
ils se croyaient libres
mais c'est faux !
du moins
je dois encore le vérifier avec toi
jeune colon
allons un peu noircir
tes pinceaux
que nous puissions
donner d'autres visages
au peuple élu
que nous puissions
peindre ensemble
quelques anges noirs
sur les voutes de la chapelle Sixtine
ou de celles qui abritaient
ces grandes haches
celles qui frappaient
des pans entiers
de l'histoire
elle est belle
n'est-ce pas?
la vérité historique
est toujours plus belle
à sens unique
mais passons
ou peut-être pas
vu que l'axe du mal
tombe plus souvent
sur les moins clairs de peau
rouge
brune
noire
elles ne sont pas assez unies
pour former un arc dans notre ciel
encore moins pour sauver le Quart Monde
et tous ces nègres à peau blanche
au bas de notre échelle sociale
elle est si mal placée jeune colon
comment veux-tu qu'ils l'atteignent ?
surtout ne leur chante pas
que la misère serait moins pénible
au soleil
ça aussi, c'est faux !
mais ils peuvent prier les cieux
si ça les console
si ça leur donne un peu d'espoir
ou de foi
d'attirer l'affection
des gardiens
de notre temple
c'est toi qui décide jeune colon
moi je n'y crois plus
je veux sentir la terre ferme
bonne ou mauvaise
je veux m'y tenir debout
cela me semble plus concret
je te laisse les idéaux
les déesses
et le double langage
spirituel ou pas
jeune colon
dans ta tour d'ivoire
ou de saint
jeune colon
n'oublie jamais
qu'à force de marcher la tête en l'air
tout le monde finit par
se prendre les pieds dans le tapis