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Je m'étais pourtant armé d'un panier de soleil.
Une copie de la mer imprimée dans mes entrailles.
J'avais fais le plein de mes calebasses de sourires ;
Titillé tant de fois mes tympans de la musicalité des vagues de mon vieux sud énigmatique.
J'avais meublé mon âme de ces doux souvenirs d'une île qui me souriait même dans la foulée de ses pleurs.
Je savais que « le périple » finirait par me farder à mon tour.
Je savais que le chemin qui mène chez les autres a cette fâcheuse tendance à gommer chaque parcelle de notre histoire ;
À questionner l'ampleur de notre identité.
Je m'étais préparé aux périples des jours mouillés de mes larmes d'exil,
Aux péripéties d'une identité qui se révèle impuissante devant les croix des autres.
Orfèvres de croix gammées qui tentent soit de nous teinter d'une couleur qu'on n'est pas, soit de gommer chaque feuille que comporte notre vie.
J'avais musclé mon coeur, renforcer chaque petit brin de raison qui m'attache à ma terre natale.
Je m'étais fais hercule, tentacule de moi-même ; lignée de convictions que demain ne m'aurait pas.
Mais hélas !
Mille fois hélas !
L'exile s'est montré plus vermine que parfum,
Plus pendule que respect ;
Plus chasseur que penseur.
L'exil a crevé ma calebasse et l'indifférence a troué mon panier.
L'exil m'a eu, aspirant une à une, chacune de mes aspirations, chacune des mes convictions, chacune de mes passions.
Brûlures d'exil au corps d'un coeur qui s'est pourtant construit sur la peau poussiéreuse de nos ports en feu.
Brûlures d'exil d'un esprit ô combien ambitieux, et qui pourtant ne peut que constater l'ampleur de sa calvitie.
Brûlures d'exil d'une envie sans retenue, d'une vie qui refuse sa caducité.
Brûlures d'exil d'une âme qui, en dépit de ses innombrables blessures, en dépit de ses failles, en dépit de ses méandres; jamais ne cessera d'aimer.